Par
Fouad BENJLIKA
Pour nombre de sociologues, ce constat reflète
le résultat d’une forte cohésion et solidarité sociales qui règnent entre les
familles dans la médina ainsi que le calme de leurs caractères et de leurs
tempéraments et leur penchant pour la paix et la stabilité, et le rejet de la
violence sous toutes ses formes […]
Si la modernité s’est installée dans nombre de
domaines de la vie quotidienne des Marrakchis, les habitants de l’ancienne
médina continuent, eux, tant bien que mal de résister aux poids des changements
imposés par ce mode de vie.
Les habitants de ce quartier emblématique se
définissent avant tout, comme détenteurs de valeurs authentiques qui font la
fierté de tout Marrakchi et qu’il est de leur devoir de perpétuer et de
transmettre ce legs civilisationnel ancestral aux générations futures.
Pour les habitants de l’ancienne médina de
Marrakech, l’attachement à leur lieu de naissance et de vie est un culte qui se
transmet de père en fils et il est difficile de convaincre, voire même
d’évoquer avec eux, l’idée de quitter la médina pour n’importe quel prix ou
pour n’importe quelle raison.
Ici, il semble pour le touriste national et
étranger que le rythme de la vie d’aujourd’hui, avec tout ce qu’il implique
d’engagements, de responsabilités et d’obligations, na pas changé d’un iota
depuis des siècles.
« Rien ne presse, rien ne doit rendre la vie
astreignante et tout peut attendre ». Telles sont la devise, la conception
de la vie et la règle de conduite des habitants de l’ancienne médina.
Ici pas le moindre risque pour que la
mondialisation, pourtant présentée comme étant un phénomène inéluctable,
n’opère le moindre changement ou menace les modes de vie et les habitudes des
habitants de ce quartier séculaire.
Le stress, considéré comme étant « la
maladie des temps modernes » et à l’origine de la prolifération de
nombreuses maladies dont l’hypertension, le diabète et la dépression, est une
notion abstraite, quasi absente et qui perd de sa signification pour les
habitants de l’ancienne médina de Marrakech.
Ces derniers ont adopté un mode de vie leur permettant
de se libérer du temps, plutôt que de viser l’acquisition des biens matériels
et l’accumulation des richesses. Se contentant du peu, ce sont des gens connus
pour leur humour, leur amour pour les anecdotes et la joie de vivre.
D’ailleurs, les plus fameux animateurs de la halqa de Jemaâ El Fna, sont issus
des quartiers de l’ancienne médina [...]
Mais ils sont aussi reconnus au niveau mondial
pour être des artisans habiles, leur artisanat étant un savoir-faire ancestral
nécessitant de la patience.
Pas étonnant donc de voir des ressortissants de
différentes nationalités élire domicile à l’ancienne médina de Marrakech et
s’adapter harmonieusement avec ce lieu féérique et devenir ainsi une composante
essentielle de la scène de ce quartier […]
Ces étrangers n’ont pas trouvé de difficulté pour
pouvoir s’adapter avec le lieu, ses habitants étant par essence enclin à la
cohabitation et à la tolérance et au respect de la diversité culturelle depuis
des siècles.
La structure en impasse et l’organisation
spatiale de la médina, qui offrent les conditions privilégiées pour les
relations sociales de proximité, ont fait de ce quartier un lieu idéal pour ces
touristes en quête de dépaysement, venus découvrir une des multiples facettes
du Maroc authentique et profond [...]
Mais l’ancienne médina c’est aussi et surtout la
nuit, qui demeure imprégnée d’un charme tout particulier. C’est devenu une
tradition ancestrale chez eux de veiller jusqu’à une heure tardive de la nuit.
Alors que certains habitants préfèrent investir les terrasses des cafés
populaires pour discuter entre amis et proches ou jouer aux cartes, d’autres
préfèrent se réfugier dans les espaces verts et les jardins publics, le temps
de respirer la fraîcheur d’un air pur, tout en s’installant autour des fontaines
[…]
S’étendant sur une superficie globale de plus de
600 hectares, et représentant une des plus vastes médinas du Maroc et la plus
peuplée d’Afrique du Nord, ce centre névralgique de la ville de Marrakech
présente un autre paradoxe aussi étonnant: la-même où le taux de précarité
sociale est assez élevé par rapport aux autres quartiers, le niveau de sécurité
enregistré est le plus élevé et le taux de la criminalité est le plus bas.
Pour nombre de sociologues, ce constat reflète le
résultat d’une forte cohésion et solidarité sociales qui règnent entre les
familles dans la médina ainsi que le calme de leurs caractères et de leurs
tempéraments et leur penchant pour la paix et la stabilité, et le rejet de la
violence sous toutes ses formes […]
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